mardi 5 novembre 2013

ERIC FOTTORINO


Journaliste, Ecrivain, romancier, il a parcouru "Le Monde" (le journal) pendant près de trente ans. Depuis la parution de son premier article en 1981 -- alors qu'il était étudiant -- jusqu'à la soirée du 11 février 2011 où dans son éditorial il dit : "Au revoir et merci" à ses collaborateurs et aux lecteurs, en quittant sa fonction de Directeur.
Eric Fottorino aura connu à ce poste depuis 2007, toutes les joies, mais aussi toutes les galères d'un journal du soir confronté aux nouvelles technologies et à la puissance du net.


Mais, qui connaît le CYCLISTE ? ... 

COURRIR  "LE MIDI LIBRE"                                     

                                                                                              Photo Eric Fougere/VIPImages                      

Certes, il n'a jamais été un "grand" champion, mais il assouvi sa passion de jeunesse en gagnant "une vingtaine d'épreuves sur route et sur piste, décrochant deux titres de champion universitaire et remportant quelques belles courses dans les côtes de Vendée, des Deux-Sèvres, et de Charente, lorsqu'il     
vivait à La Rochelle"  (1)                                                                                                                      

Qu'est-ce qui lui prend en cette année 2000, la quarantaine venant, de vouloir "faire" "Le Midi Libre" et de s'attaquer à "La Croix Neuve" de Mende ou au Mont St Clair de Séte ?  Peut-être parce que "la pratique du vélo permet de (re)partir dans la vie d'un bon pied. Tête baissée, mais tête haute, tête en l'air, tête joyeuse. Le vélo est une fête qui dure toute la vie". (1)

Cette aventure de la quarantaine il la vivra plusieurs mois avant le départ ; tout d'abord en reprenant le footing au "Jardin des Plantes", et en aménageant ses horaires au "Monde", car il est à l'époque "Rédacteur en Chef" sous la direction d' Edwy Plenel.   C'est d'ailleurs  en proposant de jouer un double rôle  --- coureur et journaliste --- courant l'étape et racontant "son" vécu" dans les colonnes du journal qu'il obtient l'adhésion de sa hiérarchie et du Directeur de la Communication qui l'aidera à obtenir les autorisations nécessaires, notamment de l' UCI (Union Cycliste Internationale). 

Après le footing, ce sera les heures de vélo sur le circuit de Vincennes, ou du côté de St Germain-en-laye, les stages avec des pros à Hyères et le retour à Neuilles-sur-mer où il retrouvera les côtes de sa jeunesse. Jour après jour Eric Fottorino nous raconte ses efforts, ses rencontres, ses souvenirs.

Il n'oublie pas non plus de parler de "son" père, ce kiné au teint mat, venu de Tunisie, qui avait séduit sa mère et leur avait donné son nom à tous les deux. Il en parlera plus longuement dans deux livres publiés chez Gallimard :
"L'Homme qui m'aimait tout bas" (2009)  et  "Questions à mon père"  (2010)

Il reviendra aussi sur son aventure de "coureur-journaliste" en publiant le récit de ses étapes du "Midi Libre" dans "Petit éloge de la bicyclette" paru chez "Gallimard" en 2007.
(1) "Je pars demain" - Stock - 2001


ALBERT JACQUARD


 Halte aux jeux 

La disparition d' Albert Jacquard provoque une avalanche de biographies,
de commentaires, de témoignages, que beaucoup d'entre nous aurons
oubliés demain.
Que restera-t-il de ses combats ?  Outre les compétences de ce généticien, de ce défenseur des plus démunis, saurons nous rappeler aux jeunes qu'il fut aussi contre la compétition --- il refusait de noter
ses élèves quand il était professeur --- et qu'il a écrit l' ouvrage
"Halte aux Jeux !" en 2005 .

L'éditeur de cet ouvrage (Livre de poche) donne en page 4 de la couverture cette note :

"Que dissimule la belle vitrine des Jeux olympiques ? On nous montre de superbes et fringants athlètes, mais on nous cache l'envers du décor : la souffrance de tous, l'échec de la plupart, l'inévitable dérive du dopage.
Il faut mettre fin à l'hypocrisie et dire ce qu'est le sport de haut niveau aujourd'hui  (ndlr : déjà en 2005) une entreprise d'exploitation de l'homme par l'homme, où la seule règle du jeu est le profit, quel qu'en soit le coût humain.
Courir plus vite, sauter plus haut, être le plus fort : il est temps de remiser cet idéal enfantin et de proposer un modèle d'olympisme enfin humaniste."

 


lundi 4 novembre 2013

VOYAGE DE NUIT



En voiture et à pied pour un aller-retour

Je suis parti hier matin, en voiture, vers un village voisin de la campagne environnante. La route était sinueuse et s'inclinait légèrement avant d'atteindre le sommet d'une colline. Quelques maisons, apparemment abandonnées, constituaient un petit hameau. J'y laissait ma voiture avec l'intention d'une petite promenade à pieds. 
Je descendais le long de la colline, empruntant le bas-côté du chemin sinueux, sans bien me rendre compte de la distance que je parcourais. Mon pas, bien que léger, m'amenait assez rapidement à ce que j'estimais être le "mi-chemin" par rapport à mon départ.  C'est à ce moment là qu'une question me vint à l'esprit.

Comment devais-je poursuivre mon parcours ? Faire demi-tour pour rejoindre le hameau à pieds et y retrouver ma voiture, ou poursuivre ma descente jusqu'au retour à mon point de départ initial ? Dans les deux cas la distance à parcourir m'apparaissait identique. Mais se posait le problème de revenir chercher le véhicule où je l'avais laissé en stationnement. Refaire tout le chemin à pieds ne m'enchantait guère.
Un ami, lui aussi en promenade carrossée, s'arrêta alors à mes côtés. Après nous être salués, je lui confiais l'objet de ma perplexité. Il me conseilla de poursuivre ma ballade sans regarder derrière moi. Il serait toujours temps de retrouver mon engin plus tard.

A y penser après coup je me dis qu'il n'a même pas eu l'idée de m'accompagner jusqu'au hameau pour m'éviter une marche inutile et retrouver plus rapidement mon étât de chauffeur. Etait-ce vraiment un ami ? Je ne le saurai jamais car il a disparu sans me dire "au revoir".  Je décidais néanmoins de suivre son conseil et repris ma route sur cette pente descendante.

J'avais en tête -- mais ma tête avait-elle toute sa raison ? -- qu'arrivé à mon domicile, j'y retrouverais ma deuxième voiture. Sans chercher plus loin, j'en déduisais que cela serait le meilleur moyen pour ensuite aller rechercher la première, restée dans le hameau. Ce n'est qu'en arrivant à destination -- la raison me revenant -- qu'une autre préoccupation me traversa l'esprit : si je repars en voiture, je vais me retrouver là-haut, tout seul, avec deux voitures.

J'évitais cependant d'avoir à solutionner de suite ce problème en m'approchant de mon garage ; je devrais dire de mes garages, puisque j'avais deux voitures. Quelle ne fut pas ma surprise en ouvrant les portes de chacun d'eux, d'y retrouver les deux véhicules qui, à l'évidence n'avaient pas bougé.

C'est alors que je me suis réveillé...

EN VILLE

                                                    



                                              
      METZ  la nuit (Cathédrale St Etienne)                                               






DEJEUNER en ville


C'est une brasserie comme il en existe en face de chaque gare. Elle accueille à la fois les habitués du petit noir sur le zinc et les voyageurs assoiffés en attente de départ. Elle nourrit aussi copieusement ceux qui prennent le temps d'y déjeuner ou sont obligés d'y diner en attendant leur rendez-vous du lendemain. Le rapport qualité/prix est bien en faveur du côté gustatif. 

Je ne la fréquente cependant que rarement, car elle est située dans mon quartier, et que je suis plus "habitué"  aus zones de chalandise de la  périphérie, bien qu'on y trouve les mêmes enseignes à Lorient, Martigues, Albi, Lille ou Hérouville St Clair...
C'est donc un jour exceptionnel qui m'y fait déjeuner, invité par ma chère et tendre qui sort de chez sa coiffeuse préférée, dont l'établissement est à deux pas.
Notre entrée est saluée par les hommes de service, en noir et blanc, qui font leur cinéma entre le tables. Du jeune chauve frisant la quarantaine à l'ancien au regard apparemment absent, mais qui voit tout et dont les yeux sont des antennes, on y trouve le panorama de tout le personnel des comptoirs et des salles nappées de coton et de serviettes en tissu. On est près de la gare certes, mais ici les serviettes de table n'ont pas laissé leur place aux "lotus" en papier fleuri. C'est dire qu'on prend soin de votre palais comme de vos lèvres.
Même la patronne, dame patronnesse, aimable et distinguée, qui se faufile entre les clients, ceux qui partent déjà pour ne pas rater leurs trains, comme ceux qui fréquentent les lavabos après avoir passé commande.
Nous sommes guidés vers la banquette qui fait le tour du mur principal et installés entre deux tables déjà garnies de convives, mais dont les commandes sont encore en cuisine. Sur ma gauche, deux femmes et deux hommes qui semblent bien se connaître sans apparaître cependant comme unis dans un couple. Les conversations que l'acoustique de la salle nous fera parvenir, de même que pour le couple se trouvant à ma droite nous le confirmeront : ce sont des "collègues".

Parmi les quatre de "gauche", il y a la régionale de l'étape, qui connaît bien le nouveau président de l'université, "un peu jeune pour assumer cette responsabilité" dira-t-elle. Les trois autres ont l'occasion de se rencontrer régulièrement dans des "laboratoires", autour de thèmes de recherche qui les conduisent à parler "des abus de positions dominantes" de certains de leurs collègues universitaires.
A parier que ce sont des "enseignants du supérieur" on gagnerait sans doute car leur niveau de connaissances  les a conduit ce jour en ces lieux pour faire partie d'un jury.  Après la choucroute, les profiteroles et le café arrosé de mirabelle, j'ai une pensée pour les étudiants qui les subiront cette après-midi. Heureusement ils sont convenus de ne pas intervenir plus de dix minutes chacun : "ce n'est pas la peine d'en faire autant chaque fois". Ce n'est pas la peine non plus de manifester trop souvent. "La dernière fois que j'ai manifesté c'était pour le Hamas, il y a longtemps" dira l'un d'eux.
Les domaines d'activités des voisins de droite font aussi l'objet de leurs conversations. Menées à voix plus basse --- ou est-ce le fait de ma surdité précoce  ---  ne me permettra pas de bien saisir leurs secteurs d'intervention. Des mots échangés, des agendas ouverts sur la table et des dossiers posés contre les pieds de la table laisseront supposé qu'ils ont chacun "leurs" clients. Mais pas "toute leur tête" au vu d'un dossier resté sous la table au moment de leur départ. Je me ferai un devoir de les en alerter pour leur éviter toute déconvenue.
Tandis que nous dégustons, qui du poisson en brandade, qui de l'omelette paysanne  --- devinez lequel des deux ? --- les tables encore libres se remplissent et le turn-over des affamés se poursuit.  Arrivées les dernières, deux dames grisonnantes et bien mises ouvrent leurs boites de pilules et parlent de leurs amis qui collectionnent les prothèses. Elles sont attentives l'une envers l'autre et se racontent les messages téléphoniques de leur parenté reçus à l'occasion de la nouvelle année.  L'une s'étonne de n'avoir pas eu des nouvelles de Chantal : "car si Alain t'a téléphoné, Chantal devait être à côté !" Mais elles n'en font pas de parano, leurs vies sont assez riches de contacts pour ne pas se soucier des humeurs de leurs descendants.
Leurs bagages sur la banquette laissent envisager un retour qui se fera tranquillement dans l'après-midi. Elles seront encore à table à notre départ. Tout comme le monsieur solitaire servi avant le départ du cuisinier qui commandera une choucroute, précédée d'un blanc sec en apéritif.
Il est 14h quand nous réglons l'addition qui confirme notre opinion initiale : nous reviendrons.